Rien, si ce n’est son audace, ne prédestinait Vinnie Myers à devenir tatoueur d’aréoles et de mamelons. Ses tout premiers clients n’étaient d’ailleurs pas des femmes, mais des soldats: « J’ai commencé à tatouer en Corée du Sud en 1984, alors que je servais pour l’armée américaine. »
Réalisant que la vie de soldat n’est pas faite pour lui, il ouvre son salon en 1991 dans la banlieue de Baltimore, où il a grandi. Artiste brillant, il devient rapidement un des tatoueurs les plus respectés de la planète. « Il était à l’avant-garde du tatouage moderne et sa réputation allait bien au-delà des frontières américaines », confie Richard France, son manager.
Star du tatouage en trompe-l’œil
Après une décennie de voyages, à la rencontre de confrères du monde entier, sa carrière bascule lorsqu’un chirurgien plasticien lui demande conseil: comment rendre un tatouage d’aréole et de mamelon le plus réaliste possible? « Ce chirurgien a su mettre son ego de côté et reconnaître que les tatouages pratiqués depuis des années par les médecins sur des seins reconstruits étaient bâclés », explique Vinnie Myers.
Intrigué, il travaille alors à développer un procédé ultraréaliste de tatouage en 3D. Une fois la technique aboutie, il en fait sa spécialité et relègue ses créations artistiques au second plan, jusqu’à ne bientôt plus se consacrer qu’au tatouage des seins.
Aujourd’hui, treize ans après ses débuts, plus de 5 000 femmes du monde entier sont passées entre ses mains. Avant de repartir, toutes peuvent laisser une trace de leur passage sur le planisphère placardé à l’entrée du salon, en plantant une punaise sur leur région d’origine.
Le tatouage du sein comme ultime étape de la reconstruction
Vinnie Myers a fait de son art un sacerdose. Au point que lorsqu’il travaille il ne peut s’empêcher de pester contre la négligence ou l’indélicatesse de certains praticiens. Et si ses clientes l’appellent parfois « docteur », il ne voit là rien de surprenant. À passer ses journées auprès d’anciennes malades, il maîtrise le vocabulaire médical. « Quand je suis avec elles, je suis un peu psy, un peu consultant, un peu toubib et un peu artiste. C’est une relation très spéciale », raconte-t-il.
Vinnie Myers a bien conscience de l’importance du tatouage du sein dans le processus de guérison. C’est l’ultime étape de la reconstruction, celle qui permet aux femmes, comme Carey Teeters nous le confiait, de « tourner la page« . Que ce rendez-vous en forme d’épilogue se déroule dans un salon de tatouage est un plus, pense le tatoueur: « L’immense majorité de ces femmes n’ont jamais mis les pieds dans un salon comme celui-là. L’expérience que je leur offre est un moment fort dont elles se souviendront toute leur vie. »
Pour découvrir le travail de Vinnie Meyers, regardez ce portrait (vidéo en anglais). Attention aux âmes sensibles.
Charlotte Alix