« Stop aux fake news« , voici le titre de la présentation qu’a faite, hier à la presse, Jean Gondry, gynécologue obstétricien au CHU d’Amiens et président de la SFCPCV1. À la veille du congrès « HPV : col utérin et autres localisations », le médecin souhaitait faire un point sur les « fausses informations qui pullulent sur internet autour de la vaccination contre les HPV. »
Pas de corrélation avec la survenue d’une maladie auto-immune
Dès leur sortie, ces vaccins avaient déjà été accusés de provoquer des maladies auto-immunes. Pour répondre à ces attaques, l’Agence nationale pour la sécurité du médicament (ANSM) avait conduit une étude épidémiologie de grande ampleur : plus de 2 millions de jeunes filles, âgées de 13 à 16 ans, vaccinées ou non, ont été suivies de 2008 à 2012. Sur les 14 maladies auto-immunes recherchées, les chercheurs n’ont établi de lien qu’avec l’apparition d’un syndrome de Guillain Barré (SGB) : une maladie qui atteint les nerfs périphériques, caractérisée par une paralysie progressive, qui disparaît au bout de quelques mois dans la grande majorité des cas. Mais corrélation n’est pas causalité comme le rappelait le rapport : « Ainsi, en faisant l’hypothèse (non établie) que l’association mise en évidence est bien de nature causale, le nombre de cas de SGB attribuables à la vaccination serait de l’ordre de 1 à 2 cas pour 100 000 jeunes filles vaccinées. » Une causalité non établie et un risque très faible : des résultats qui ne remettent pas en cause le bénéfice de la vaccination.
Pas d’augmentation du nombre de cancers
Récemment, une nouvelle polémique a émergé : ces vaccins ne protègeraient pas contre le cancer du col de l’utérus mais le provoqueraient ! Ces accusations ont été véhiculées par deux personnalités : Nicole Delépine, ancienne cancérologue pédiatrique, et Gérard Bapt, ancien député. Selon eux, le nombre de cancers du col de l’utérus aurait augmenté depuis le début de la vaccination chez les femmes de la tranche 20-25 ans.
Leurs allégations reposent notamment sur une étude australienne qui montre une augmentation de 114% des cas de cancers du col de l’utérus dans cette population entre 2007, date du début de la vaccination, et 2014, date des données les plus récentes à disposition. Des chiffres qui ne permettent cependant pas de lier vaccination et cancer comme l’explique Jean Gondry : « Les jeunes filles qui se sont faites vacciner en 2007 avaient entre 12 et 13 ans, cela signifie qu’en 2014, elles n’avaient que 19 à 20 ans. Les jeunes filles vaccinées ne se trouvent donc pas dans la tranche d’âge des 20-25 ans. Il est impossible de conclure que les jeunes filles vaccinées en 2007 ont eu une augmentation du cancer du col en 2014. Ça n’a pas de sens. Il faudrait attendre les chiffres de 2019 pour le savoir. Par ailleurs, on observe une augmentation des cancers du col de l’utérus dans beaucoup de pays et ce, quelle que soit la tranche d’âge. » Aucun lien avec la vaccination donc puisque celle-ci concerne les jeunes filles n’ayant pas encore eu de rapports sexuels.
Autre critique du gynécologue à la polémique : le choix des années comparées. « Pour prouver l’augmentation de 114%, ils ont comparé l’année 2006 avec l’année 2013. Ce n’est pas faux » reconnaît Jean Gondry, graphique à l’appui.
« Mais si je prends les années 2004 et 2014, poursuit-il, on observe une diminution. Pour autant, je ne vais pas vous annoncer ça, ça n’aurait pas plus de sens. Si ce n’est pas faux en terme de chiffre, c’est faux en terme d’interprétation. Ce n’est pas à partir de 2 années prises ponctuellement qu’on peut conclure sur l’incidence d’un événement. Il faut lisser les choses. »
« Ce qu’on sait c’est que dans les pays où la vaccination est bien organisée, on a une réduction très importante des lésions précancéreuses chez les jeunes filles vaccinées » ajoute le gynécologue. « Nous n’avons pas encore prouvé que cela a une incidence sur le cancer mais c’est logique : il y a un délai en moyenne de 20 ans entre l’infection par le HPV et l’apparition du cancer. L’impact de la vaccination ne sera donc visible que dans quelques années » conclut Jean Gondry.
Le saviez-vous ?
Quand on pense HPV, on pense automatiquement cancer du col de l’utérus. Ces virus sont en effet associés à la quasi totalité de ces cancers. Ce que l’on sait moins c’est que les HPV sont également associés à 90% des cancers de l’anus, 50% des cancers de la verge, 40% des cancers de la vulve, 70% des cancers du vagin et 40% des cancers de l’oropharynx.
Emilie Groyer
1. Société française de colposcopie et de pathologie cervico-vaginale