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Sweetie : « Sortir tête nue m’a aidée à avoir confiance en moi »

{{ config.mag.article.published }} 8 octobre 2018

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Gwenn a décidé de nous aider à défendre la cause des malades. Le 17 février 2018, elle a organisé un vide-dressing à notre profit à la Maison Rose Bordeaux

Elle est l’une des youtubeuses les plus connues grâce à sa chaîne « le petit monde de sweetie ». Une notoriété qui lui permet aujourd’hui de revenir librement sur son lymphome, à 20 ans.

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Vous avez créé votre chaîne YouTube il y a 5 ans, juste avant d’être malade ?

Gwenn. Oui. J’étais vendeuse en parfumerie le week-end, pendant mes études d’esthétique, et j’avais du mal à aller au-devant des clients. Je me suis dit que parler face à une caméra m’aiderait à avoir confiance en moi et que mes connaissances en cosmétique pourraient être utiles.

Aujourd’hui, vous avez une communauté importante [+ de 650 000 abonnés, NDLR]. Tout ça par le bouche à-oreilles ?

Au début oui, mais comme mon copain de l’époque était connu [Squeezie, youtubeur spécialiste de jeux vidéos qui compte plus de 10 millions d’abonnés à sa chaîne YouTube, NDLR] et qu’en plus j’ai été malade, une foule de gens sont venus sur ma chaîne, en partie par solidarité. Ça m’a propulsée.

Quand on remonte vos vidéos, on identifie bien, à l’évolution de votre chevelure, la période correspondant à votre cancer. Vous avez dit depuis avoir essuyé de nombreux commentaires désobligeants à l’époque. C’est vrai ?

Oui. J’ai été malade en 2014-2015 et j’en ai très peu fait état dans mes vidéos. Ma chaîne était mon exutoire et j’avais plus envie de parler de mes routines soins ou maquillage, de mes produits fétiches, de mes « miaoubox »… Mais dans leurs commentaires, de nombreux internautes ont considéré que je leur manquais de respect parce que je ne portais pas de bonnet ou de perruque face à la caméra…

Ils se sentaient agressés en fait…

Exactement. J’ai été surnommée Professeur Xavier (X-Men), Krilin (Dragon Ball), Tortue géniale (Dragon Ball), M. Propre… A l’époque aussi, passait la série Breaking Bad à la télé, dont le héros, ingénieur chimiste, finit par fabriquer de la méthamphétamine pour se payer ses traitements et assurer l’avenir de sa famille. Du coup, comme certains – incroyablement ignorants du système de santé français – m’accusaient de me servir de mon copain pour payer mes traitements, j’ai aussi eu droit à Heisenberg (pseudo du personnage principal de la série)… Même sur ma chaîne, j’avais le sentiment de devoir me battre pour être acceptée, alors que mon vrai combat était ailleurs.

Comment avez-vous répliqué ?

J’ai fait une vidéo, « méchanceté, intimidation, amour propre » , pour expliquer que je trouvais ces commentaires blessants, et j’ai enregistré « chauve » et tous les surnoms qu’on me donnait comme « mots interdits », pour qu’ils n’apparaissent plus sur ma chaîne.

Je suis aussi tombée sur une vidéo qui explique, en dessins, comment vous avez découvert votre lymphome. Racontez-nous…

Oui, c’est « draw my life », que j’ai réalisé la veille de ma première chimio pour éviter d’avoir justement à y revenir ensuite et préparer mes abonnés à me voir changée. J’y raconte comment, en décembre 2013, alors que j’étais entre deux statuts, étudiant
et salarié, je me suis réveillée une nuit avec des bouffées de chaleur et une douleur à la base du cou. Comme je craignais de devoir avancer les frais si un médecin me demandait des examens complémentaires, j’ai attendu avant de consulter. Quand mon affiliation au régime général a été actée, j’ai vu un médecin et après des tas d’examens,
j’ai été diagnostiquée d’un lymphome hodgkinien. J’ai fait un prélèvement d’ovocytes pour le cas où les traitements me rendraient stériles et en juillet 2014, j’ai commencé ma première chimio à Gustave-Roussy.

Comment avez-vous vécu vos séances de chimiothérapie ?

Ça a été très difficile. Le jour de la dernière séance, la seule odeur des couloirs de l’hôpital
m’a fait vomir. Je n’en pouvais plus…En revanche, ce qui a été très étrange, c’est que j’ai eu mes règles 3 jours après. Mon corps a dû sentir que c’était la dernière, il s’est réveillé et j’ai repris mon rythme comme s’il ne s’était jamais rien passé.

Et la perte des cheveux ?

Bizarrement, je l’ai assez bien vécue. Sortir tête nue, par exemple, ça m’a aidé à avoir confiance en moi. Avant, quand j’avais les cheveux longs, je me cachais derrière dès que je me sentais un peu gênée. Mais quand on n’a plus rien, on ne peut plus se cacher, alors autant marcher la tête haute ! D’ailleurs, quand mes cheveux ont retrouvé leur longueur, j’ai recommencé à baisser la tête dans la rue et à me cacher. Comme si ma confiance en moi diminuait au fur et à mesure que mes cheveux poussaient ! Du coup, je me suis fait faire un carré un peu court.

Vous démarriez votre d’adulte quand vous avez été frappée par la maladie. En quoi cela a-t-il modifié votre rapport à la vie, et à l’avenir ?

Il y a vraiment eu un avant et un après la maladie. L’après-cancer, c’est comme une deuxième chance, alors je remercie la vie. J’ai gagné en confiance en moi et je ne dénigre plus mon corps. Je ne me dis plus qu’il lui faudrait un peu plus de sport, un peu moins de ci ou plus de ça. Il m’a sauvée donc il sait parfaitement se débrouiller ! Avoir remporté
cette bataille m’a aussi donné envie de me battre pour une meilleure reconnaissance des patients*. Quand j’étais malade, par exemple, aucune marque de beauté ou de vêtements ne voulait travailler avec moi, parce que je donnais une mauvaise image. Je veux sensibiliser le grand public pour qu les malades n’entendent plus ça.

Vous marier, avoir des enfants, vous projeter, y arrivez-vous aujourd’hui ?

Ça, c’est encore assez difficile, je le reconnais. Je suis en rémission depuis près de trois ans, mais pendant deux ans, je n’arrivais pas à me projeter au-delà des trois mois qui me séparaient de ma consultation. Chaque fois, la veille de la visite, j’avais peur que tout rebascule. Aujourd’hui, je suis de nouveau en couple, mais ça reste difficile, parce que j’ai toujours cette petite peur au fond de moi… Pour l’instant, me lever le matin en me sentant bien, ça me suffit !

 


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Béatrice Lorant

Ancienne rédactrice en chef de Rose magazine

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