Les chiffres publiés par l’Institut National du Cancer (INCA) dans son Panorama des cancers en France 2023 font froid dans le dos. L’incidence des cancers chez la femme est en hausse constante alors qu’elle se stabilise chez les hommes. En dépit de résultats très encourageants pour les cancers gynécologiques, le nombre de cas de cancer du sein n’a jamais été aussi élevé depuis 1990 et celui du poumon féminin explose.
Les raisons de cette augmentation
En cause, l’évolution démographique (hausse du nombre d’habitants et vieillissement), suivie de l’augmentation du risque avec un éclairage tout particulier de l’étude sur les comportements individuels. Sédentarité, surpoids, tabac, exposition solaire, alcool sont ainsi la priorité des politiques de prévention, à juste titre. Les expositions environnementales sont, en revanche, à peine mentionnées alors même que beaucoup reste à accomplir en la matière tant sur le plan de la recherche que de politiques publiques. Et l’annonce, il y a deux jours, du probable renouvellement à l’échelon européen -et qui sait français- de l’autorisation du glyphosate, pourtant jugé cancérogène depuis plusieurs années tant par le Centre International de Recherche contre le Cancer que par l’Inserm, n’est vraiment pas de bon augure.
Des données restent peu commentées
Au-delà de ces chiffres alarmistes, ce qui retient notre attention dans ce Panorama, ce sont deux types de données peu commentées : d’une part, sous l’effet conjugué de la baisse régulière du taux de mortalité par cancer et de l’augmentation des taux de survie à 5 ans, on compte aujourd’hui en France 2 millions de femmes qui ont ou ont eu un cancer grâce aux progrès de la recherche et de la médecine. Très bonne nouvelle !
D’autre part, parmi les dépenses liées au médicament, l’INCa décrit la part croissante de la rétrocession[1] et de la pharmacie d’officine. Cela met indirectement en lumière l’importance du virage ambulatoire et domiciliaire. On sait ainsi, par exemple, qu’une patiente soignée pour un cancer du sein passe 1,5% de son temps à l’hôpital. Et comme le rappelle très justement ce Panorama, 63,5% des patients souffrent de séquelles 5 ans après, et ce sans compter les difficultés professionnelles.
La qualité de vie et le rôle des patients dans leur parcours de vie restent des enjeux majeurs
Ainsi, en plus des nécessaires efforts qui restent à déployer pour guérir les cancers dits de mauvais pronostic et accélérer l’accès à l’innovation, les enjeux de la qualité de vie et du rôle de la personne malade dans son parcours de soins, et plus largement de vie, mériteraient toute leur place dans ce Panorama.
Nous, RoseUp, pouvons témoigner de l’ampleur du phénomène dans notre quotidien d’acteur de terrain. C’est précisément pour répondre aux besoins des femmes atteintes de tout type de cancer de rompre leur isolement, de s’informer, d’améliorer leur qualité de vie et d’être actrices de leur parcours de vie pendant et après les traitements que l’association agit depuis douze ans.
Les Maisons RoseUp et M@ Maison RoseUp, créées et imaginées par RoseUp pour aider les femmes à rester actrices de leur parcours de vie
Nous avons imaginé Rose Magazine puis le concept de Maison RoseUp. Une Maison RoseUp, c’est un joli cocon en centre-ville où, chaque année, 400 à 500 femmes échangent entre elles, sont écoutées, orientées, informées et accompagnées de façon personnalisée dans la gestion de leurs effets secondaires et leur reprise professionnelle à travers 130 à 150 ateliers chaque mois, le tout gracieusement. Une équipe de cinq salariées et d’une quarantaine d’intervenants professionnels rémunérés pour la plupart est mobilisée dans chaque Maison.
Après l’ouverture de nos deux premiers lieux à Bordeaux en 2016 et Paris en 2019, nous avons lancé, il y a un an, M@Maison RoseUp, notre 3è Maison accessible en ligne. En à peine 12 mois, ce sont plus de 3 600 femmes partout en France qui sont accompagnées au quotidien depuis chez elles par des chargées de mission et une équipe d’intervenants professionnels. A Bordeaux et Paris, depuis la fin des restrictions Covid, nous repoussons littéralement les murs pour faire face aux besoins. Cela nous conduit à envisager de changer de local à Bordeaux, d’étendre les horaires d’ouverture à Paris, de renforcer l’équipe d’accompagnement en distanciel et d’ouvrir de nouvelles Maisons RoseUp ailleurs sur le territoire.
Bref, ces statistiques « froides », nous les mesurons et les vivons au quotidien. Aux côtés des professionnels de santé et d’autres institutions publiques, nous travaillons et innovons pour faire face aux enjeux liés à l’augmentation du nombre de cas de cancer chez la femme et aux transformations des modalités de prise en charge.
Pour en savoir plus sur nos actions et nous soutenir, rendez-vous sur www.rose-up.fr.
Retrouver notre rapport d’activité 2022.
Isabelle Huet, directrice de RoseUp Association
[1] Dispensation, par la pharmacie à usage intérieur d’un établissement de santé, de médicaments à des patients non hospitalisés.