J’ai 53 ans, et on peut dire que j’ai une longue histoire avec le cancer. J’ai grandi avec puisque ma grand-mère, ma mère, et puis ma sœur ont été touchées par un cancer du sein. J’apprendrai au cours de mon parcours que nous sommes porteuses d’une mutation du BRCA2. Donc quand en 2013 on m’annonce mon diagnostic, je ne m’effondre pas, ce n’est pas vraiment une surprise. Ce que je n’appréhende pas alors c’est le long parcours qui m’attend. Double mastectomie, puis reconstruction puis récidive en 2017. On doit me retirer la chaîne ganglionnaire et j’ai de la chimio. Puis, en 2018, je décide d’opter pour une chirurgie prophylatique des ovaires, et je commence dans la foulée une hormonothérapie que je suis toujours. Je n’aurais jamais pu faire cette longue traversée du cancer sans mes agendas. Ils ont été un outil de travail quand j’étais orthophoniste, ils sont devenus mes béquilles, mes balises.
Un espace d’expression libre
J’ai commencé par y noter tous mes rendez-vous médicaux, mes dates d’examens. Puis j’ai consigné toutes les informations qu’on me donnait sur mon cancer, les traitements envisagés, les questions que cela suscitaient chez moi et les réponses qu’on me donnait. J’ai aussi fait beaucoup de recherches personnelles et j’ai archivé dans ces carnets les infos que j’ai pu glaner. Jusqu’ici cela m’a servi à ne pas perdre le fil, malgré les troubles de la mémoire qui ont pu m’affecter. Face à cette maladie, on est confronté à la nécessité de faire des choix souvent difficiles qu’on est seules à devoir prendre. Rester actrice de mon parcours a toujours été important pour moi. C’est encore le cas aujourd’hui
Ces pages représentent un espace d’expression libre où je me suis autorisé à tout écrire, à exprimer aussi mes doutes, mes émotions, telles qu’elles. Aujourd’hui, j’ai quatre ou cinq agendas bien remplis qui racontent toute mon histoire. Ils sont la mémoire vive de mon cheminement.
Propos recueillis par Sandrine Mouchet
Photo : Patrick Swirc
Retrouvez cet article dans Rose Magazine (Numéro 24, p. 44)