Même si la technique chirurgicale du ganglion sentinelle a permis de réduire nettement sa fréquence quand il est consécutif à un cancer du sein, le lymphœdème empoisonne encore la vie de 6% à 25% des patientes1. Heureusement, des solutions existent pour limiter sa progression
La compression et la contention : la méthode de référence
Diminuer l’œdème au moyen de drainages lymphatiques manuels associés à des bandages compressifs multi-couches ou plus légers, «élastorigides», c’est l’objectif de la physiothérapie décongestive combinée. Aujourd’hui, certainement «le» traitement de référence en matière de drainage et de contention. «Il n’y a pas de bandage stéréotypé. Comme pour les verres de lunettes, c’est du ‘sur mesure’’ !», précise Jean-Claude Ferrandez, président de l’Association française des masseurs-kinésithérapeutes pour le traitement et la recherche des atteintes lympho-veineuses. Cette méthode est d’autant plus efficace que la prise en charge intervient rapidement après le curage axillaire. Pour être efficace, elle doit être réalisée de manière régulière par des kinés spécialisés.
À raison d’une cure de 5 séances d’une demi-heure par semaine pendant quinze jours, on peut espérer une baisse de 40 % du volume du bras et de 60 % de celui de l’avant- bras. À renouveler quand le besoin se fait sentir. Attention: «Le drainage avant et après les bandages en augmente l’efficacité mais, seul, il n’a pas beaucoup d’intérêt», souligne le Dr Stéphane Vignes, chef de l’unité de lymphologie de l’hôpital Cognacq-Jay à Paris. «La compression doit aussi être portée tous les jours. C’est contraignant mais, plus les patientes font d’efforts, plus c’est payant.» Les résultats varient d’une femme à l’autre selon la méthode de drainage utilisée.
Une fois le résultat obtenu, le lymphoedème doit être contenu par des manchons (quand il touche le bras) ou des bas (quand ils touchent les membres inférieurs) de contention pour éviter qu’il ne reprenne du volume.
Option hospitalisation
Autre possibilité: l’autogreffe ganglionnaire. « Cette opération, qui dure environ deux heures, est pratiquée à partir d’une masse tissulaire graisseuse contenant des ganglions sains et leurs vaisseaux nourriciers, explique le Dr Corinne Becker, chirurgien à la clinique Jouvenet. Puis le greffon est transplanté au niveau de la région ganglionnaire ayant subi une ablation. Ces “nouveaux” ganglions rempliront le rôle de ceux enlevés lors du curage ou neutralisés par les rayons. » Résultat ? 48% des lymphœdèmes sont normalisés et 98% améliorés. On constate aussi une diminution notable des infections, de 80% à 20%, et des douleurs atténuées dans 95% des cas. Cette intervention est contre-indiquée si des infections chroniques ont détruit les canaux lymphatiques et s’il y a eu une récidive cutanée ou ganglionnaire axillaire.
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Cures thermales hyperciblées
Pionnières dans la prise en charge de cette pathologie, les stations d’Argelès-Gazost et Luz-Saint-Sauveur. C’est à cette dernière que l’on doit Lympho’Thermes®, le premier programme de soin du lymphœdème. Au programme : des soins individuels avec drainages lymphatiques manuels, bains hydromassants, séances de Thalaxion (drainage par jets d’eau thermale de la chaîne ganglionnaire), compresses d’eau thermale, pressothérapie… et ateliers de lymphologie (voir ci-dessous). Le protocole ne serait pas complet sans activité physique. Un minimum est fortement recommandé pour activer le système veineux et lymphatique et lutter contre le surpoids (aquagym, Pilates, marche nordique, qi gong ou encore taijiquan…).
Aujourd’hui, nombreuses sont les stations thermales qui proposent un programme adapté, comme à Argelès-Gazost, La Léchère-les-Bains, Luz-Saint-Sauveur, Barbotan, Luxeuil-les-Bains, Evaux-les-Bains, La Roche-Posay ou Aix-les-Bains. Pour vous aider à faire votre choix, cliquez sur le site officiel-thermalisme.com. Pour celles qui ne disposent pas de trois semaines devant elles, la plupart de ces stations proposent des cures de six jours. Seul bémol : ces dernières ne sont pas remboursées par la Sécurité sociale.
Ateliers de lymphologie : vive l’autonomie !
Apprendre en deux temps trois mouvements à monter soi-même un bandage ou à pratiquer l’autodrainage, c’est le principe des ateliers de lymphologie. On vous enseignera aussi les gestes à éviter ainsi que les techniques de prévention et d’autodépistage pour reconnaître tout signe anormal (augmentation de volume, rougeur, risque de lymphangite nécessitant rapidement une antibiothérapie…). Sans oublier le B.A BA : quelle activité physique pratiquer et comment bien gérer son poids, indispensable pour limiter le lymphœdème ! Ces ateliers sont proposés dans certaines stations thermales et certaines antennes de l’association Mieux vivre le lymphœdème.
INFO + : L’hôpital Cognacq-Jay, référence dans la prise en charge du lymphœdème propose des tutoriels en format vidéo pour apprendre à faire ses bandages soi-même. N’hésitez pas à en parler également à votre kiné s’il ne connait pas encore ces gestes !
Le sport en renfort
Bonne nouvelle : le gros bras n’est pas une contre-indication à l’activité physique ! Au contraire : « Il faut bouger, explique le Dr Stéphane Vignes, pour éviter que votre bras ne s’atrophie ou ne perde du muscle mais aussi pour rééduquer l’épaule ». Inutile de soulever d’emblée des haltères de 5 kilos mais « ne vous interdisez rien ». Soyez votre propre guide, selon votre ressenti, vos attirances, et vous trouverez ce qui vous fait du bien. Et d’ajouter: « Si vous sentez une douleur, vous stoppez le mouvement ».
Oui, mais quel sport ? Si les Dragon Ladies pratiquent l’aviron en rugissant de plaisir, d’autres préfèreront des activités plus douces. A côté de la gym adaptée avec un kiné pour vous réhabituer à l’effort, la palette est large : Rose pilates, yoga, Qi gong, natation.Le Tai Chi Chuan est aussi particulièrement adapté : « durant les mouvements, les contractions musculaires agissent comme une pompe drainante », souligne Evelyne Vatinel, masseur-kinésithérapeute et psychologue. Quant à la respiration abdominale qui accompagne les mouvements lents de cet art martial interne, elle provoque une chute de la pression intra-thoracique, « ce qui occasionne une force de succion qui facilite le flot lymphatique« . Également recommandée, la marche nordique avec bâtons : elle permet, sans (trop !) y penser, d’accentuer le mouvement naturel de balancier des bras et de propulser le corps vers l’avant à l’aide de bâtons, soit une dépense calorique deux fois plus importante, un renforcement de l’ensemble de l’appareil musculaire, une tenue droite et une posture dynamique. Autres possibilités : les programmes d’activité physique adaptés que proposent les associations et fédérations sportives.
1. Environ 20% des femmes traitées pour un cancer gynécologique ou du sein développent un lymphoedème. Seules 6% des femmes traitées pour un cancer du sein et ayant bénéficié de la technique du ganglion sentinelle en sont touchées.
Article mis à jour le 28/11/2022