Le dragon boat est une discipline sportive dérivée du canoë-kayak. Reconnaissable à sa tête de dragon vissée à sa proue, l’embarcation accueille 8 pagayeurs, un barreur à l’arrière et un tambour à l’avant pour donner le rythme. En 1996, un médecin canadien tente une expérience avec des femmes atteintes d’un cancer du sein. Il entend prouver que pagayer favorise la guérison et aide à prévenir la rechute. Un premier équipage de dragon ladies voit le jour en Amérique du Nord puis gagne rapidement d’autres continents. La France compte aujourd’hui 50 clubs. Reims est le plus ancien. C’est là que Stéphanie Pillonca a planté sa caméra pour raconter, de l’intérieur, la vie d’un équipage de femmes qui pagaient pour guérir… Au casting : Julie Gayet et Bérengère Krief (entre autres) qui n’ont pas hésité une seconde à monter à bord.
Comment vous êtes-vous retrouvées embarquées dans cette aventure ?
Julie Gayet : Quand j’ai reçu le scénario, j’ai tout de suite été séduite par cette histoire et le combat de ces femmes. Chacune avait un parcours singulier, puissant… J’ai dit à Stéphanie Pillonca qu’elle pouvait me confier le rôle qu’elle voulait, je la suivrais !
Bérengère Krief : Au-delà de l’histoire qui nous a toutes touchées parce qu’elle résonne familièrement, on a partagé nos scènes de bateau avec des filles qui vivent vraiment l’épreuve du cancer du sein. J’ai découvert leur force intérieure, leur capacité à se dépasser par le sport, dans un esprit de corps.
« Sur le bateau on était avec des femmes qui vivent le cancer dans leur chair » – Bérengère Krief
Qu’avez-vous ressenti au cours de ces semaines de tournage passées presque exclusivement entre femmes ?
Julie Gayet : Je m’aperçois, depuis 2017, date à laquelle la parole des femmes s’est libérée, qu’une forme de sororité est apparue. Je travaille au côté de La Fondation des Femmes, je vois bien qu’une solidarité nouvelle s’est emparée de nous. Je ressens davantage de bienveillance, moins de compétition… J’ai retrouvé cela sur le tournage où il a pu arriver, par le passé, de vivre des tensions entre comédiennes. Là, nous étions toutes dans une réelle bienveillance.
Bérengère Krief : À bord du Dragon Boat, il y avait aussi Claire, Gribouille et Sylvie. Je me disais : « Nous on joue mais pas elles. Elles vivent vraiment ce truc dans leur chair ». Sylvie, m’a particulièrement bouleversée. Quand je vois ce petit bout de femme toute en discrétion et qui, une fois la pagaie en main, se défonce pour l’équipe, je suis scotchée. Je suis certaine que si elle n’avait pas été atteinte de ce cancer, elle n’aurait sans doute jamais su qu’elle avait cette force de guerrière en elle. Alors oui, ce qu’elles vivent est super dur mais, j’ai pu me rendre compte qu’elles sortaient grandies de leur expérience sur le bateau.
Quels sont les profils des femmes que vous incarnez ?
Bérengère Krief : Je joue Poups. On sait peu de choses sur sa vie. Je l’ai imaginée assez seule, pas très sociable, elle n’a pas forcément envie d’échanger sur son expérience. Elle a peu d’espoir, elle intériorise tout jusqu’au jour où la colère finit par sortir. L’expérience avec ce groupe de femmes va la transformer.
Julie Gayet : Mon personnage est une femme bien élevée, discrète, qui ne parle pas de sa maladie. Elle voit que son mari a des soucis avec son entreprise, et elle ne veut pas en rajouter. Elle prend sur elle. Est-ce la bonne attitude ? En tout cas, cette aventure va la révéler à elle-même, et lui permettre de se reconnecter à son mari. Chacune de ces femmes fait ce qu’elle peut pour affronter cette épreuve. Julie de Bona, bien que son personnage soit “guéri“, est toujours habitée par la peur. Firmine Richard, elle, c’est la figure de l’optimisme. Toute cette diversité était intéressante à montrer parce qu’elle est le reflet de ce qu’on observe autour de nous.
« On réalise à quel point le cancer est un poids pour toute la cellule familiale » – Julie Gayet
Ce téléfilm a-t-il changé le regard que vous portiez sur le cancer ?
Bérengère Krief : Ça m’a apporté des informations que je n’avais pas. Par exemple, je n’avais pas conscience de la peur et de la grande solitude dans laquelle on plonge en une fraction de seconde. Il y a la perte de l’insouciance parce que tout d’un coup, on sait qu’une fin prématurée est possible. Et puis, on comprend ce besoin d’aller vers des gens qui connaissent ce parcours du combattant pour pouvoir échanger. Ce film m’a aussi permis de mesurer la manière dont l’entourage proche est impacté.
Julie Gayet : Je crois que c’est ce rapport à la famille qui m’a le plus marquée. La façon dont on gère les enfants, ce qu’on leur dit ou pas, comment les proches réagissent… Souvent ils se taisent, ils masquent mais ça ne les empêche pas de souffrir aussi. C’est un poids pour toute la cellule familiale. Et puis, j’ai découvert l’importance du sport dans la guérison physique et mentale. Je ne connaissais pas du tout les dragons ladies, ni le Dragon boat. Leur but n’est pas juste de s’entrainer pour la course finale qui rassemble les équipages du monde entier à Venise (la Vogalonga ; elle se déroule tous les ans, le dimanche de la Pentecôte, ndlr), mais de faire du sport et celui-là en particulier, pour favoriser la guérison et réduire le risque de récidiver.
À VOIR
Le souffle du dragon, mardi 11 octobre à 21h10 sur M6.
Téléfilm réalisé par Stéphanie Pillonca avec aussi : Julie de Bona, Lola Dewaere, Annie Gregorio, Firmine Richard, François Berléand et Arié Elmaleh.