C’est la nouvelle arme minceur. Dans les magazines féminins, les dîners en ville, les cabinets des nutritionnistes, on ne jure plus que par le régime « Fast diet », ou « 5: 2 diet » (5 jours de plaisir, 2 jours de jeûne), qui oblige l’organisme à puiser dans ses réserves de graisse. Même les chercheurs en oncologie s’y intéressent.
Motif ? Le surpoids représente un facteur de risque pour certains cancers et est parfois considéré comme responsable d’une moindre réponse à la chimiothérapie. Du coup, cette pratique du jeûne intermittent est étudiée dans ses moindres effets par différentes équipes de chercheurs. Et, aux États-Unis, elle soulève l’enthousiasme du Pr Valter Longo.
Scepticisme au menu
Le 8 février 2012, dans une étude publiée par la revue américaine Science, ce spécialiste en gérontologie explique qu’en expérimentation animale (sur la souris) de courtes périodes de jeûne potentialisent les effets de la chimiothérapie sur certains cancers, voire sont aussi efficaces qu’elle. Pourquoi? Parce que la cellule cancéreuse est dépendante du glucide et que, sans glucide, elle régresse, voire meurt.
Alors, thérapeutique, le jeûne? Chez les cancérologues, le scepticisme prévaut.
« Ces travaux ne peuvent absolument pas être extrapolés à l’humain, remarque le Dr David Coeffic, oncologue médical à la clinique Hartmann, de Neuilly. Ils ont été effectués dans des conditions expérimentales, sur des lignées cellulaires cancéreuses in vitro, et chez la souris. Or, dans les mécanismes de destruction ou de survie tumorale interviennent aussi le terrain immunitaire du patient, la biologie de la tumeur et d’autres facteurs, innombrables, qu’on ne peut pas reproduire dans un travail de laboratoire. »
Stresser une cellule ? Il y a d’autres méthodes
Même prudence du côté du Pr Laurent Zelek, oncologue à l’hôpital Avicenne, à Bobigny, qui, en l’état actuel des connaissances, ne se voit pas inciter des patients, « qui n’auraient rien demandé », à jeûner. Tous les spécialistes reconnaissent au contraire l’importance de la nutrition.
« Un patient dénutri a moins de chances de répondre au traitement et, là-dessus, il y a des milliers de publications, insiste le Dr Coeffic. La technique du jeûne constitue juste un moyen de stresser la cellule pour que les médicaments l’aident à mourir ».
Or, on peut obtenir ce stress de manière plus astucieuse, comme l’explique le praticien : « par une radiothérapie focalisée, d’autres médicaments… Enfin, pour leur bien-être, mieux vaut proposer à nos patients une prise en charge psychologique, du yoga, une activité physique, de l’homéopathie, de l’acupuncture, etc. »
Céline Dufranc et Béatrice Lorant