Face aux cancers, osons la vie !


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J’assume ma boule à 0

{{ config.mag.article.published }} 25 novembre 2024

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Leslie (à gauche) et Jen (à droite) n’hésitent pas exhiber fièrement leur tête nue sur les réseaux sociaux.

La chimio leur a fait perdre leurs cheveux... Et alors?! Dans leur story et leurs vidéos, certaines instagrameuses n’hésitent pas à se montrer telles qu’elles sont: crâne nu, nature et décomplexées. C’est le cas de Jen, 35 ans, et de Leslie, 28 ans. Interview sans filtre.

Quand vous vous regardez dans un miroir, comment vous trouvez-vous ?

LESLIE. Je ne me suis jamais sentie autant moi-même que depuis que je n’ai plus de cheveux. Dans le miroir, je me vois, moi, à nu. Et je vois une femme forte ! Avant j’avais les cheveux aux épaules et frisés. Mais ce n’est qu’une question d’apparence. Avoir des cheveux, ou ne pas en avoir, ne change pas celle que je suis profondément.

JEN. En ce moment, je ne me trouve pas top. Lorsque j’ai rasé mes cheveux, j’avais encore mes cils et mes sourcils, ça me donnait un petit style badass. J’aimais bien. Là, j’ai une légère repousse, mais pas encore de cils, ni de sourcils, et c’est beaucoup moins cool. Maquillée, habillée, ça passe, je me retrouve un peu plus…

Sur Instagram, vous semblez pourtant assumer…

JEN. Oui, parce que c’est la réalité de ce que je suis. Sur mon compte [créé au moment de l’annonce de son cancer du sein, en juin 2023, ndlr], on trouve des photos où je ne suis clairement pas à mon avantage, mais je m’en fous en fait ! J’assume tout. Pas question de rentrer dans le travers des réseaux sociaux en donnant à voir un personnage un peu fake ! Je ne veux pas que les filles qui me suivent s’identifient à quelqu’un qui n’est pas vrai. Ce serait un mensonge que de dire : t’inquiète, tu vas être super-fraîche et au top même avec un cancer !

LESLIE. Moi aussi j’essaie d’être transparente. Depuis mes années lycée, j’utilise mon compte comme un journal intime où je raconte mon quotidien. Ça n’a pas changé depuis l’annonce de mon cancer [en juin 2022, d’un cancer du sein, qui a récidivé en 2023 avec des métastases, ndlr]. Je dis quand ça va et quand ça ne va pas. Il n’y a que lorsque ça ne va vraiment pas que je reste en retrait des réseaux sociaux, je n’ai pas envie d’attirer la pitié.

Touchées par un cancer, Jen assume son crâne nu - rosemagazine-roseupassociationJEN, 35 ans

PROFESSION : responsable de projets d’innovation
SON COMPTE : @manouvellevieenrose
FOLLOWERS : 443 (en mars 2024)
SA PHILOSOPHIE : « Sur ma page, on rigole, on fait le guignol et on râle aussi un peu ! »
SON + : « ses bûchettes », des vidéos où elle se filme en train de danser sur une chanson qu’elle aime.

Leslie, sur votre Instagram, une des photos que l’on remarque est celle de votre crâne spectaculairement maquillé. Qu’est-ce qu’elle dit de vous ?

LESLIE. Cette photo date d’octobre 2023. Elle a été prise lors du shooting organisé par l’association Maquille mon krâne. C’est un exercice incroyable. Quand je me suis vue, j’ai été choquée par le travail réalisé par la maquilleuse. Je me suis trouvée canon, et féminine. Me maquiller, c’est quelque chose que je ne fais quasiment plus. Avec les traitements, la fatigue, je préfère passer dix minutes de plus à dormir le matin plutôt que devant la glace.

JEN. Moi qui suis très sensible au côté créatif et esthétique, j’aurais adoré participer à un de ces shootings. Mais, quand j’ai essayé de m’inscrire, c’était blindé ! C’est dans ce genre de moment que, avec ton crâne nu, tu peux faire quelque chose de beau.

Quels retours avez-vous quand vous vous exposez ainsi ?

LESLIE. Beaucoup de malades me suivent en espérant assumer leur tête comme je le fais. Si je peux donner confiance à d’autres femmes, c’est formidable.

JEN. C’est toujours très bienveillant. Comme je déconne beaucoup, je reçois plein de commentaires de femmes touchées par le cancer ou même de proches qui me disent : merci de nous faire rire. Si je peux apporter un sourire à une seule malade qui pleurait dans son coin, alors je suis contente, j’ai atteint mon objectif!

Peut-on vraiment rire de tout ?

JEN. Sur les réseaux, il y a des sujets qui ne sont jamais abordés. Par exemple, on y évoque que très rarement les problèmes de transit liés à la chimio. C’est pas glam et un peu tabou d’en parler, surtout quand on est une femme. J’ai décidé de m’emparer de ce sujet. Tout en restant sérieuse sur le fond, je tiens toujours à ce que la forme soit rigolote. Et j’ai eu plein de commentaires très marrants, preuve que j’ai réussi à décomplexer les gens sur le sujet. Avec le rire, on peut tout dire sans dramatiser…

LESLIE. C’est important de savoir rire de soi, de rester positive, même si ce qui nous arrive n’est pas drôle. Et également d’accepter de ses amis qu’ils en plaisantent aussi. Quand, en soirée, un copain me dit qu’il me trouve bien coiffée, moi, ça me fait rire !

Touchées par un cancer, Lesly assume son crâne nu - rosemagazine-roseupassociationLESLIE, 28 ANS

PROFESSION : attachée parlementaire
SON COMPTE : @lesliedervaux
FOLLOWERS : 1 850 (en mars 2024)
SA PHILOSOPHIE : « Toujours sourire, même si ce n’est pas toujours facile. Et aller de l’avant. »
SON LEITMOTIV : « Faites attention à vous ! »

Quel message souhaitez-vous faire passer ?

LESLIE. Quand on m’a annoncé mon cancer, j’avais 26 ans, j’ai jugé que j’étais trop jeune pour être confrontée à cette maladie. J’ai d’abord voulu sensibiliser les gens au fait que le cancer du sein n’arrive pas qu’aux femmes de plus de 50 ans, mais aussi aux jeunes femmes. Et pas seulement aux femmes d’ailleurs, mais aussi aux hommes. Je répète sou- vent dans mes posts que c’est important de faire attention à soi et, quand on a un doute, d’aller consulter. Tant pis si ce n’est rien finalement. Il vaut mieux ça que de laisser un mauvais truc traîner trop longtemps…

JEN. J’ai été aidante de ma grand-mère qui a eu deux cancers et qui n’est plus là. Donc, quand mon diagnostic est tombé, je savais ce qui m’attendait, et j’ai tout de suite eu envie de partager mon quotidien, de transmettre des choses susceptibles d’aider d’autres femmes. Parce que l’on est tellement démunie quand ça nous tombe dessus ! On va sur Google,et c’est l’horreur ! J’ai pensé que ce serait bien de faire une page qui rende accessible à tout le monde ce qu’on vit au fil du parcours. Et de documenter tout ça sans pathos, tout en rappelant aussi que ce que je vis m’est personnel, que chaque cas est différent. Je suis très vigilante là-dessus

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Illustration : Matthieu Méron

À LIRE AUSSI : Jeunesse et cancer : le souffle coupé

Photo : Bruno Juminer

Retrouvez cet article dans Rose magazine n°26.


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Sandrine Mouchet

Journaliste, rédactrice en chef de Rose magazine et directrice de Rose Magazine Éditions

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