Voilà trente-cinq ans que Jacques-Alain Lachant, ostéopathe aujourd’hui responsable d’une consultation sur la marche à la clinique du Mont-Louis (Paris), observe comment ses patients se « portent » et, surtout, marchent. Verdict : on ne sait plus faire ni l’un, ni l’autre. Or, une grande part de nos douleurs dorsales, de nos problèmes musculaires et squelettiques viennent de là. Si l’on y ajoute les contrecoups d’une chirurgie ou d’une radiothérapie, responsables de bien des désordres posturaux, on se dit qu’il est temps de suivre sa méthode. Pas à pas…
Comment sait-on que l’on marche mal ?
Si le fait de marcher vous est pénible, que vous avez mal partout en marchant peu, ou si vous êtes mince et que vous avez la sensation de peser des tonnes lors de vos déplacements, c’est que vous ne vous « portez » pas.
C’est-à-dire ?
Se porter part du bas. La sensation vient du pied, qui va conférer un sentiment d’ancrage, ce que j’appelle la sécurité de base. On donne une impulsion au niveau du pied arrière. En le posant, on le déroule, et on réattaque en prenant appui sur ses trois plus gros orteils. Ce travail des jambes est à l’origine des deux tiers de l’allègement du poids du corps. Les mains ont aussi un rôle à jouer. Elles accompagnent le mouvement d’un léger balancier, comme si on se tenait par la main soi-même, la pulpe du pouce en contact avec l’index.
C’est tout le secret ?
Il faut aussi un bon tonus abdominal. Votre point d’appui global passe par là. Pour le rétablir, une astuce : debout, plantez les orteils dans le sol, comme si vous vouliez vous y agripper. Vous verrez, la bascule se fera instantanément et votre placement sera le bon. Enfin, il y a le regard : toujours avoir un point de repère devant soi.
C’est compliqué, de corriger ses mauvaises habitudes ?
Non, cela peut venir très rapidement. Je raconte toujours l’histoire de cette patiente de 84 ans, voûtée et sujette aux chutes, avec tous les risques de fracture que cela entraîne, qui est repartie de notre premier rendez-vous toute droite ! On a ensuite peaufiné sa posture pendant une dizaine de séances.
Quand on est traité pour un cancer, quel bénéfice peut-on tirer de votre méthode ?
Quand la verticalité se perd, le psychisme s’effondre. Lorsqu’on se porte, on ne subit plus, on se réapproprie son corps, on habite l’espace. On harmonise sa pensée. Les ruminations cessent. La marche portante aide les malades en traitement à retrouver un sentiment de sécurité, une vitalité, une énergie. On est du côté des vivants à nouveau. C’est le meilleur des antidépresseurs.
Propos recueillis par Patricia Oudit
INFO +
La Marche qui soigne, de Jacques-Alain Lachant, éditions Payot.