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Mon hormonothérapie et moi. Elise: « Je ne pensais même pas qu’on pouvait avoir mal aux os »

{{ config.mag.article.published }} 15 décembre 2018

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L’hormonothérapie a prouvé son efficacité pour réduire les risques de récidives de cancers du sein hormonodépendants. Si elle est bien tolérée par certaines femmes, elle est responsable d’effets secondaires handicapants pour d’autres. Témoignage.

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L’histoire de cette série de témoignages
« Mon hormonothérapie et moi », une série de 5 témoignages sur le vécu des femmes sous hormonothérapie, fait suite à un appel à témoin auprès de notre communauté. Pour vous en rappeler le contexte et ses limites, nous vous invitons à lire au préalable cet article.

J’ai été diagnostiquée d’un cancer du sein à 33 ans. On m’a retiré le sein gauche et j’ai eu droit à de la chimio et de la radiothérapie. Je suis sous Zoladex, un analogue de LH-RH, depuis 2 ans et 8 mois. Je n’étais pas ménopausée à l’époque mais mon médecin m’a prescrit ce traitement car je suis jeune et qu’il y a des antécédents de phlébites dans ma famille qui contre-indiquent le Tamoxifène. Tous les 28 jours, une infirmière vient me faire une injection. L’aiguille est très impressionnante. D’ailleurs au début l’infirmière ne voulait pas que je regarde mais il suffisait de voir les marques sur mon ventre pour se rendre compte que ce n’était pas une petite seringue.

J’ai souffert de bouffées de chaleur au début mais elles ont fortement diminué depuis que je fais de l’auriculothérapie. Le plus gênant ce sont les douleurs osseuses. Je ne pensais même pas que c’était possible d’avoir mal aux os ! Parfois, j’ai mal aux os des mains, du dessus du pied et même des pommettes. C’est dingue !

« On vous enlève une part de votre vie de femme, déjà qu’on m’en a enlevé pas mal… »

On ne m’a pas parlé de ces effets secondaires pendant les consultations et donc encore moins des solutions pour les soulager. Alors j’ai trouvé mes propres astuces. Par exemple, j’ai remarqué que j’avais moins mal quand je buvais beaucoup après l’injection. Et j’essaie de bouger un maximum : je rentre du travail en marchant, je vais à la piscine. J’essaie de ne pas m’écouter aussi. Mais je suis conseillère bancaire et quand je dois m’occuper du guichet et que je reste debout toute la journée, c’est difficile. J’ai mal aux genoux, aux chevilles…

J’ai aussi une sécheresse vaginale et une perte de libido. J’ai seulement 36 ans et je ne ressens ni le besoin ni l’envie d’avoir des relations. C’est terrible. On vous enlève une part de votre vie de femme, déjà qu’on m’en a enlevé pas mal : on m’a retiré un sein, pendant la chimio j’ai perdu mes cheveux… Ça va que mon conjoint est conciliant et qu’on échange beaucoup sur ce sujet. Mais c’est compliqué de lui dire qu’il me fait mal. J’en ai parlé à mon oncologue, il m’a prescrit des lubrifiants. Ça aide juste à “fluidifier” les choses sinon c’est très désagréable. Pour la libido en revanche, sa réponse a été : « Ça passera quand vous arrêterez le traitement. »

L’hormonothérapie m’a été prescrite pour 5 ans par mon oncologue. Il suit le protocole. Ma gynécologue en revanche m’a dit : « Compte tenu de votre âge, la balance bénéfice/risque d’une ménopause précoce induite est défavorable car elle entraîne des troubles cardio-vasculaires, de l’ostéoporose, de l’hypertension… Pour moi, ça ne vaut pas le coup, vous pourriez arrêter ». D’ailleurs depuis un peu plus d’un an, je fais de l’hypertension et j’ai un traitement en plus pour ça. Comme c’est la guerre entre mon oncologue et ma gynécologue, j’ai demandé un 3ème avis dans un centre privé. On m’a donné une réponse de Normand : « Vous pouvez arrêter à 3 ans. »

« On n’est pas juste des moutons qui avalent un comprimé quand on leur dit de le faire »

Alors, pour m’aider à prendre une décision, j’ai demandé des chiffres : « OK, si j’arrête maintenant, quels sont les risques de récidive ? ». D’abord, on m’a regardé l’air de dire : « Mais pourquoi vous posez la question, le protocole c’est 5 ans, c’est tout. » Les médecins ont du mal à comprendre qu’on n’est pas juste des moutons qui avalent un comprimé quand on leur dit de le faire. Finalement, on m’a répondu : « On n’est pas capable de vous donner des chiffres car on manque de données notamment chez les femmes jeunes. » En gros, c’est « faites comme vous voulez ».

J’arrive presque au bout des 3 ans mais j’essaie de ne pas y penser. C’est flippant parce que si je prends la décision d’arrêter et que mon cancer récidive, est-ce que je ne vais pas m’en mordre les doigts ? L’un des facteurs qui va entrer en ligne de compte c’est notre envie d’avoir un enfant. Si je choisis le protocole de 5 ans, j’aurai 38 ans à l’arrêt du traitement. Ça peut être problématique. Heureusement, avant ma chimiothérapie, on m’a fait un prélèvement d’ovocytes qui m’attendent bien gentiment au congélateur. La blague préférée de mon conjoint : « Si on s’en sert, on appellera nos enfants Miko et Freeze ! »

À LIRE AUSSI : Retrouvez l’intégralité des épisodes de notre série « Mon hormonothérapie et moi » ici.

 

Propos recueillis par Emilie Groyer


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Emilie Groyer

Docteur en biologie, journaliste scientifique et rédactrice en chef du site web de Rose magazine

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