La dernière fois qu’une star est apparue sur grand écran la boule à zéro, c’était Natalie Portman dans V pour Vendetta, en 2005. Avant elle ? Il y eut Laura Smet (Les Corps impatients) en 2002, Demi Moore (À armes égales) en 1997 et bien sûr Sigourney Weaver (Alien 3) en 1992. C’est peu dire qu’elles ont été des exceptions.
Le cinéma, le show-biz en général, mais aussi la pub, la mode adorent les filles à la chevelure abondante et les glamourisent. « Les perdre, c’est perdre de sa féminité. Et leur absence reste encore une curiosité… » confirme le socio-ethnologue Michel Messu1. Au mieux ! Celles qui connaissent la perte totale (ou même partielle) des cheveux parlent plutôt de violence des regards, de stigmatisation, de marginalisation.
Pas étonnant que 22 % des patientes en cancérologie concernées par l’alopécie confient affronter cette épreuve dans la plus grande solitude2. Pour 83 % d’entre elles, cette phase est, de toute façon, « difficile, voire très difficile, à vivre ». Se retrouver crâne nu, c’est être livré sans protection, sans défense, au monde extérieur.
Aujourd’hui, dans nos sociétés modernes, plutôt individualistes, « ils sont une expression de la personnalité. Ils livrent nombre d’indices sur les goûts, la profession, le caractère et même sur les opinions des personnes », note l’historienne Sabine Melchior-Bonnet3. Choisir de les porter courts ou longs, naturels ou colorés, dit, montre, manifeste quelque chose de soi. Il n’est d’ailleurs pas rare que des patientes, à l’issue des traitements qui ont modifié leur relation avec leur corps, et parfois même leur regard sur la vie, changent complètement de look.
Karine Dessale et Sandrine Mouchet
(1) Auteur d’Un ethnologue chez le coiffeur (éd. Fayard 2013)
(2) Enquête Alopécie Rose Magazine/Any d’Avray 2013
(3) Les Vies du cheveu, avec Marie-Christine Auzou, (éd. Découvertes Gallimard, 2001)