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La toxine botulique : une solution étonnante pour combattre les douleurs liées au cancer

{{ config.mag.article.published }} 30 avril 2021

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La toxine botulique, connue pour lutter contre les rides, fait son entrée en oncologie pour soulager certaines douleurs liées au cancer. Décryptage avec le Dr Lemaire, spécialiste de la douleur.

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La toxine botulique, ou botox pour les intimes, est pour beaucoup synonyme d’anti-rides. Pourtant, depuis peu, cette neurotoxine bactérienne est indiquée dans une autre application bien éloignée de la médecine esthétique : le traitement des douleurs liées au cancer.

La toxine botulique fait son entrée dans les référentiels du traitement de la douleur

Si la toxine botulique est connue pour empêcher la contraction des muscles, lorsqu’elle est injectée sous la peau ou dans le derme (plutôt que dans le muscle, comme en médecine esthétique), elle révèle d’autres propriétés. Analgésiques cette fois. « Une série d’études ont montré son efficacité dans certaines douleurs, notamment liées au cancer  » confirme le Dr Antoine Lemaire, chef du pôle Cancérologie et Spécialités Médicales du Centre Hospitalier de Valenciennes.

Pourtant, malgré ces bons résultats cliniques, le médecin ne pouvait pas la prescrire jusque-là à ses patients. « Parce qu’elle n’a pas d’autorisation de mise sur le marché dans cette indication, explique le spécialiste de la douleur. De nombreux anti-douleurs sont dans ce cas. Nous sommes néanmoins autorisés à les prescrire lorsque nous avons un encadrement scientifique et financier de leur utilisation. »

Cet encadrement est arrivé l’année dernière lorsque la Société française d’étude et de traitement de la douleur (SFETD) met à jour ses recommandations. La société savante y reconnaît l’utilité de la toxine et lui permet ainsi de faire son entrée en pratique courante. « Cela nous permet de prescrire la toxine botulique en 2ème intention dans les douleurs neuropathiques localisées » précise le Dr Lemaire.

Autre petite précision qui a son importance : la toxine, utilisée comme anti-douleur, est réservée à un usage hospitalier. « Même s’il s’agit du même produit que pour les rides, les protocoles d’injections sont différents de ceux de la médecine esthétique. Ce traitement ne peut pas être administré en cabinet médical. »

En deuxième intention

Trois conditions donc pour recevoir la précieuse toxine. Il doit s’agir d’un traitement de 2ème intention et concerner des douleurs neuropathiques et localisées.

Deuxième intention. En d’autres termes : après avoir reçu au moins un autre traitement qui s’est révélé inefficace. Une condition d’accès peu limitative selon le Dr Lemaire : « C’est le cas de la plupart de nos patients. On le propose souvent à des patients qui ont eu bien plus qu’un seul traitement avant. Ce sont des patients en échec thérapeutique après que de nombreux traitements, y compris des traitements associés entre eux, ont été testés. »

Dans le cas de douleurs neuropathiques…

Douleur neuropathique. Comprendre : douleur liée à une lésion nerveuse causée par les traitements contre le cancer comme la chirurgie, la radiothérapie ou certaines chimiothérapies neurotoxiques. Elle se caractérise par des sensations de picotements, de fourmillements, d’engourdissement, de démangeaison, de brûlure ou de décharge électrique.

Les douleurs neuropathiques ne doivent pas être confondues avec les douleurs dites nociceptives. Ces dernières apparaissent lorsque la tumeur endommage les tissus qu’elle envahit. Elles sont lancinantes, permanentes. Elles se manifestent, même au repos, par des sensations d’écrasement, de broiement ou de torsion.

… localisées

Douleur localisée. Autrement dit, la zone touchée doit être peu étendue.

La toxine est particulièrement indiquée pour des douleurs circonscrites, comme l’explique le Dr Lemaire : « Quand le patient souffre d’une allodynie, c’est-à-dire une douleur déclenchée par le moindre contact ou frottement, il est parfaitement capable de délimiter la zone douloureuse. Et on peut alors la quadriller en injectant la toxine tous les centimètres. »

C’est notamment le cas des douleurs séquellaires. « Par exemple, chez des patientes qui ont eu un cancer du sein, qui ont été traitées par des rayons ou de la chimiothérapie et qui ont des zones douloureuses délimitées autour de la cicatrice chirurgicale » précise le spécialiste de la douleur.

La toxine n’est en revanche pas adaptée aux douleurs neuropathiques périphériques. Même si elles sont localisées aux extrémités – en général, les pieds et les mains -, la zone est trop étendue pour se prêter à de telles injections.

Diminuer le recours aux autres analgésiques

L’effet de la toxine botulique est variable selon les douleurs et les individus comme le constate le Dr Lemaire : « Les effets vont être très progressifs après les premières injections. Il faut être patient. On sera amené à réévaluer la douleur. Chez certains patients, il sera nécessaire de répéter les injections tous les 3 à 4 mois. Chez d’autres, la douleur finit par disparaître au bout de quelques séances et on peut alors arrêter les traitements. »

Au-delà de soulager ces douleurs récalcitrantes, la toxine botulique présente un autre avantage selon le médecin : « Grâce à la toxine, on va pouvoir diminuer voire suspendre les autres traitements antalgiques. On pourra ainsi limiter les effets secondaires de ces traitements au long cours. Il faut aussi avoir à l’esprit que nos patients atteints d’un cancer reçoivent en parallèle des traitements à visée curative : de la chimiothérapie, de l’hormonothérapie, de l’immunothérapie… Nos traitements de support et ces traitements curatifs peuvent entrer en interaction. La toxine botulique, par son approche localisée, va éviter de déstabiliser les autres traitements, d’avoir des effets indésirables ou des interactions médicamenteuses. Ça la rend d’autant plus pertinente. » Un gain conséquent pour la qualité de vie des patients.

INFO +

Retrouvez l’intégralité du webinaire sur les douleurs liées au cancer animé par le Dr Lemaire sur notre chaine YouTube.

 

Emilie Groyer


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Emilie Groyer

Rédactrice en chef du site web de Rose magazine. Titulaire d'un doctorat en biologie, Emilie a travaillé 10 ans dans le domaine des brevets en biotechnologie avant d'opérer une reconversion dans le journalisme. Elle intègre la rédaction de Rose magazine en 2018. Sa spécialité : vulgariser des sujets scientifiques pointus pour les rendre accessibles au plus grand nombre.

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