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Dépistage du cancer colorectal : un tabou qui coûte des vies

{{ config.mag.article.published }} 6 septembre 2021

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Il touche plus de 43 000 Français, dont 20 000 femmes, et fait plus de 17 000 victimes chaque année. Détecté précocement, ce cancer se guérit pourtant dans neuf cas sur dix. Il s’agit juste de passer deux minutes aux toilettes tous les deux ans. Simple, basique, mais ça coince…

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Si depuis 1994 octobre est rose, pour symboliser la lutte contre le cancer du sein, depuis 2008 mars se colore en bleu, pour sensibiliser au cancer colorectal. « Attention, mars bleu, ça ne veut pas dire que ça ne concerne que les hommes ! » lance aussitôt Sandra, une pétillante Italienne de 59 ans installée en Franche-Comté. Elle-même, touchée par un cancer du rectum il y a une dizaine d’années, se mobilise dans la région de Pontarlier pour informer sur ce cancer bien plus fréquent qu’on ne le pense. Plus de 43 000 cas sont détectés chaque année en France. Quelque 23 000 hommes et 20 000 femmes, une parité quasi parfaite.

Dans deux cas sur trois, il touche le côlon, et pour le tiers restant, le rectum. La majorité des cancers colorectaux (80 %) se développe à partir de polypes adénomateux au niveau de la muqueuse. La plupart sont bénins, mais certains (entre 2 % et 3 %) évoluent en lésion cancéreuse, l’adénocarcinome. Plus récemment a été identifié un autre type d’adénome, dit festonné sessile, qui peut également se transformer en cancer. Tous ces polypes peuvent être observés grâce à une coloscopie pratiquée sous anesthésie générale [voir encadré]. Avantage de cet examen : il permet de retirer en même temps les polypes qui présentent un risque d’évoluer en cancer.

« Ma mère avait une vie saine et pas de symptôme, à part un peu mal au ventre…» – Sylvie

Ceux qui ont déjà subi cette exploration se sont vu remettre les photos de cette zone de leur corps dont il est rare qu’on sache vraiment à quoi elle ressemble. Une occasion inédite donc de « voir » que le côlon constitue la partie terminale du tube digestif, après l’intestin grêle. C’est un organe d’environ un mètre de long (quand même) en forme de U inversé. Il se prolonge par le rectum, petit segment d’une quinzaine de centimètres où sont stockées les selles avant leur évacuation par l’anus.

Pas très glamour tout ça, c’est vrai, et c’est bien tout le problème. Difficile en effet d’attirer l’attention sur ces deux organes particulièrement mal-aimés, sièges (si l’on peut dire) d’un cancer qui peut rester très longtemps asymptomatique. Ainsi la tumeur de Sandra était-elle à un stade déjà avancé lorsqu’elle a été détectée. « Elle devait se développer depuis huit ou dix ans », confie Sandra. « C’est un cancer vicieux », résume Sylvie, dont la maman a eu un cancer du côlon à 76 ans. « Elle ne buvait pas, ne fumait pas, avait un mode de vie très sain et pratiquement aucun symptôme, à part un peu mal au ventre. Puis elle s’est rendu compte qu’elle avait du sang dans les selles. Je lui ai conseillé de consulter… » Les examens ont révélé une tumeur sur le sigmoïde (dernière portion du côlon avant le rectum), qui a nécessité une opération, une stomie (pose d’une poche pour récupérer les selles) et des rayons. « Psychologiquement, cela a été très dur », souligne Sylvie. Plus on détecte la maladie tôt et plus on augmente les chances du patient d’échapper à un traitement lourd. La bonne nouvelle, c’est que grâce à un dépistage précoce on guérit de ce cancer dans neuf cas sur dix…

Prendre la maladie de vitesse

On le voit, tout l’enjeu consiste à prendre la maladie de vitesse. La stratégie employée dépend du niveau du risque. D’abord sont mises sous surveillance serrée les personnes qui montrent un terrain favorisant la survenue de la maladie. En premier lieu, celles porteuses d’une anomalie génétique héréditaire (telle que le syndrome de Lynch) ou souffrant de polypose adénomateuse familiale, une affection héréditaire qui entraîne la formation de centaines, voire de milliers de polypes. Toutes ces personnes (toutefois peu nombreuses) présentent un « risque très élevé » (de 40 % à 100 %) de développer un cancer colorectal et font l’objet d’un suivi intensif.

EN CHIFFRES

2/3 des cas de cancer colorectal touchent des personnes sans antécédent

18 millions de français, âgés de 50 à 74 ans, sont ciblés par le dépistage organisé, seuls 32% font le test

C’est le cas de Jacqueline. Depuis dix ans, elle sait qu’elle est porteuse du syndrome de Lynch, révélé grâce à un test oncogénétique1. Ses deux fils, de 34 et 36 ans, sont également porteurs. Ils sont suivis par coloscopie tous les deux ans. « Pour bénéficier d’un suivi personnalisé quand on a le syndrome de Lynch, mieux vaut s’adresser à un centre pluridisciplinaire, il y en a pratiquement dans tous les CHU maintenant », conseille-t-elle. Sont ensuite considérées à « risque élevé » les personnes ayant des antécédents personnels (un cancer colorectal ou un adénome) ou qui ont, comme Sylvie, des antécédents familiaux (un cancer colorectal chez un parent au premier degré), ainsi que celles souffrant d’une maladie inflammatoire chronique de l’intestin. Une coloscopie est alors recommandée tous les trois à cinq ans en fonction de ce qui a été observé lors de la coloscopie initiale.

Contrairement à ce que veut une idée reçue, les individus les plus à risque ne représentent qu’une minorité des cas de cancer colorectal, composés de 3 % à 5 % de personnes à risque très élevé, et de 15 % à 20 % de celles qui sont à risque élevé. Dans deux tiers des cas, les individus touchés n’ont donc aucun antécédent. C’est pourquoi, depuis 2008, a été mis en place un programme de dépistage national organisé, comme pour le cancer du sein et celui du col de l’utérus.

Un tabou bien français ?

Vous êtes une femme ou un homme, âgé(e) de 50 à 74 ans et sans antécédents ? Vous faites alors partie des 18 millions de personnes considérées comme à « risque moyen » et donc ciblées par le dépistage organisé. Pour vous, pas de coloscopie systématique, mais un test gratuit de recherche de saignement occulte dans les selles. Tous les deux ans, un courrier vous invite à consulter votre médecin généraliste pour obtenir le « kit de dépistage ». Il peut aussi être remis par un spécialiste (gynécologue, ou hépato-gastro-entérologue). Ce kit contient le matériel nécessaire pour prélever un échantillon de selles à la maison et l’envoyer pour analyse. S’il est positif, pas de panique ! Ce n’est pas obligatoirement synonyme de cancer. Une coloscopie prescrite par votre médecin (et prise en charge à 100 %) permettra de poser un diagnostic. « Dans 30 % à 40 % des cas, une lésion précancéreuse est découverte, qui pourra être enlevée directement lors de l’examen. Dans 8 % à 10 % des cas, c’est un cancer qui est détecté », précise le Pr Thierry Ponchon, hépato-gastro-entérologue à l’hôpital édouard-Herriot, à Lyon.

Grâce à ces différentes stratégies, le taux de mortalité par cancer colorectal est en recul (-1,8 % chez les hommes et -1,6 % chez les femmes, par an, sur la période 2010-2018 2). En revanche, le nombre de cas ne cesse d’augmenter. En cause, le vieillissement de la population. Mais il faut y voir aussi la conséquence d’une participation au dépistage organisé encore largement insuffisante. Seulement 32 % des 50-74 ans font le test en France. Alors qu’ils sont plus de 60 % en Écosse ou en Finlande et 70 % aux Pays-Bas à le faire…

« On s’extasie devant les premiers caca des bébés, mais après il ne faut plus en parler ! »  – Sandra

Dédramatiser le sujet

Plusieurs campagnes d’information ont été tentées pour dédramatiser le sujet et lancer une « guerre du trône », à coups de slogans humoristiques : « Un petit beurk vaut mieux qu’un gros aïe », « Parlons fesses ! »… Un Côlon tour quadrille la France chaque année, déployant un côlon gonflable géant à l’intérieur duquel on peut cheminer pour observer le développement et l’évolution des polypes…

Rien n’y fait. Y aurait-il un tabou latin autour du prélèvement des selles ? Même si, avec 50 % d’adhésion au test, l’Italie fait mieux que la France, Sandra en demeure convaincue : « On s’extasie devant le premier caca des bébés, mais après il ne faut plus en parler ! » Le Pr Ponchon, qui préside le centre régional de coordination des dépistages des cancers (CRCDC) Auvergne-Rhône-Alpes, observe de son côté « une grande disparité sur le territoire ». « Le dépistage marche particulièrement mal dans les zones très urbanisées, son taux n’est que de 17 % à Paris, par exemple », détaille-t-il, pointant du doigt les modalités du dispositif de distribution du test. Un peu trop rigide, et reposant encore trop exclusivement sur le médecin généraliste.

Accroître le taux de dépistage serait pourtant un moyen simple et efficace de faire reculer significativement ce cancer. Avec une adhésion de 45 %, on pourrait déjà éviter plus de 3 500 nouveaux cancers et 4 000 décès par an, selon les données du ministère de la Santé et de l’Inca. D’autant plus que le nouveau test immunologique, utilisé depuis 2016, est beaucoup plus fiable que l’ancien et que la coloscopie a aussi progressé. « Il y a encore dix ans, on laissait passer environ 20 % des adénomes à la coloscopie. Aujourd’hui, la qualité de l’imagerie s’est améliorée, ainsi que la formation des gastro-entérologues, qui détectent mieux les lésions et sont capables de mieux déterminer la nature d’un polype, sans avoir besoin d’attendre les résultats du prélèvement », assure le Pr Ponchon.

COLOSCOPIE, MODE D’EMPLOI

Ceux qui ont déjà passé cet examen sont unanimes : la préparation est désagréable, mais elle est incontournable pour un résultat fiable. Le but : arriver le jour J avec un côlon parfaitement propre. Le « nettoyer » signifie faire durant trois jours un régime sans résidus, uniquement à base de riz ou de pâtes, de viande ou de poisson peu gras (ou d’œuf) et de biscottes (ou de pain grillé). La veille de l’examen, une préparation laxative à boire permet de vider l’intestin juste avant le coucher. Le lendemain, rendez-vous à jeun au bloc opératoire pour trente minutes d’exploration qui nécessite (sous anesthésie générale) d’insuffler de l’air dans le côlon pour en déplisser les tissus. D’où une sensation de ballonnement au réveil et… des flatulences.

Alerte chez les moins de 50 ans

Les personnes de plus de 50 ans représentent aujourd’hui 95 % des cas de cancer colorectal. Mais de récentes études mettent en lumière une inquiétante progression de l’incidence chez des adultes bien plus jeunes dans les pays occidentaux. Aux États-Unis, un rapport publié par l’American Cancer Society montre que la maladie a progressé de 2,2 % par an chez les moins de 50 ans entre 2011 et 2016. L’Europe n’est pas épargnée. Selon une étude publiée en 2019 dans Gut 3, portant sur 143 millions d’Européens dans vingt pays, le nombre de cas de cancer colorectal a augmenté de 1,6 % chez les 40-49 ans, de 4,9 % chez les 30-39 ans et même de 7,9 % chez les 20-29 ans, par an, de 2004 à 2016 !

En France, sur le terrain, les médecins attestent de cette évolution récente. « Nous traitons de plus en plus de jeunes qui ont un cancer à 30 ou 40 ans », confirme le Pr Éric Rullier, chirurgien au CHU de Bordeaux et spécialiste du cancer du rectum. Échappant aux radars, ces cancers sont souvent détectés à un stade avancé, et ils sont agressifs. Faut-il s’alarmer ? Le Dr Marion Dhooge, gastro-entérologue à l’hôpital Cochin, à Paris, nuance : « Il faut savoir qu’on part de chiffres faibles : en 2017, les cancers colorectaux chez les moins de 50 ans représentaient 2 400 nouveaux cas par an. » Un chiffre à rapporter aux 42 400 cas détectés la même année chez les plus de 50 ans.

L’augmentation reste néanmoins préoccupante, d’autant plus qu’on a du mal à l’expliquer. Il y a bien la piste génétique, mais celle-ci n’explique qu’environ 20 % de ces cancers. Alors, quoi d’autre ? Certains éléments intriguent : « La hausse concerne les pays industrialisés et pas les pays du Sud. Certains facteurs de risque du cancer colorectal sont connus, comme l’obésité et le tabac. Mais, aux États-Unis, des études ont montré, à prévalence égale de ces deux facteurs, des différences selon les états. En Italie, une autre étude a montré une hausse des cas dans la région de Milan, mais pas ailleurs », souligne le Dr Dhooge. Y a-t-il un impact de certains aliments, comme une consommation excessive de viande rouge ou de produits transformés ? De la pollution ? Des pesticides ? Est-ce lié à des expositions précoces dans l’enfance ? À un déséquilibre du microbiote ? Pour l’instant, les chercheurs n’excluent aucune hypothèse, mais « il y a certainement des causes environnementales au sens large », abonde le Dr Dhooge.

EN CHIFFRES

3 500 nouveaux cas par an et 4 000 décès pourraient être évités si on arrivait à un taux d’adhésion au test de dépistage de 45%

Cela étant dit, faut-il abaisser l’âge du dépistage ? Aux États-Unis, l’American Cancer Society conseille, depuis 2018, de se faire dépister dès 45 ans. Pour l’instant, la Société française d’endoscopie digestive (Sfed) n’envisage pas de recommandation dans ce sens. Mais une réflexion est en cours pour informer les gastro-entérologues et les médecins généralistes, afin qu’ils n’hésitent plus à prescrire, en cas de symptômes, une coloscopie, y compris pour des patients très jeunes. Pour les 20-30 ans, touchés principalement par des cancers du rectum et du sigmoïde, on peut envisager « la rectosigmoïdoscopie, ou coloscopie “courte”, qui se pratique sans anesthésie », indique le Pr Chaussade, président de la Sfed.

Une parole de plus en plus libérée

Reste à sensibiliser ce public de jeunes adultes, souvent mal informé sur ce cancer, et dont les symptômes assez peu spécifiques peuvent être facilement mis sur le compte d’autres pathologies, moins graves. Chez Amandine, dont le cancer a été détecté à 34 ans, tout a commencé par de violentes douleurs dans le bas-ventre, et son médecin a d’abord pensé à une cause gynécologique. Les examens n’ayant rien donné, il l’a envoyée chez un gastro-entérologue. « Il a diagnostiqué une inflammation du côlon et m’a mise sous antibiotiques, en me disant de revenir un mois plus tard. En trois jours, je n’avais plus mal », raconte cette jeune aide-soignante. Heureusement pour elle, le gastro-entérologue lui avait aussi prescrit, « par précaution », une coloscopie : elle a révélé une tumeur au sigmoïde de stade 4, avec des métastases hépatiques et pulmonaires.

PLUTÔT QU’UNE « COLO », UNE CAPSULE EXPLORATRICE…

Une alternative à la coloscopie existe : la capsule colique, qui s’avale comme un simple cachet. Son usage dans le dépistage du cancer du colorectal est limité aux patients qui refusent la coloscopie, ou qui présentent une contre-indication à l’anesthésie générale. Une fois ingérée, elle parcourt le tube digestif en prenant des milliers de photos.

Jugée moins fiable, cette technologie est en passe de connaître un nouveau développement. Des chercheurs du laboratoire d’informatique de Paris 6 (LIP6) travaillent en effet à la mise au point d’une capsule Cyclope. Celle-ci produira des images haute définition et en 3D, qui seront triées par un système d’intelligence artificielle. « Aujourd’hui, 80 % des coloscopies monopolisent un gastro-entérologue pour dire qu’il n’y a rien. Notre dispositif ne lui transmettra que les images douteuses », explique Bertrand Granado, l’un des responsables du projet. Ainsi ne feraient une coloscopie que les patients concernés par des lésions précancéreuses, afin qu’on leur retire sous endoscopie.

Ce qui doit alerter ? « Des saignements persistants, du sang mélangé aux selles, des douleurs inhabituelles, une perte d’appétit ou de poids inexpliquée, une modification du transit », énumère le Dr Marion Dhooge. En cas de doute, il ne faut pas hésiter à consulter, même si ces sujets ne sont pas toujours faciles à aborder. Libérer la parole reste d’ailleurs un problème de fond pour le cancer colorectal, à tous les âges.

Partager son expérience

Amandine a ouvert un compte Instagram pour raconter son parcours. La jeune maman a réussi à rassembler « une communauté de malades », dont la plus jeune n’a que 24 ans. « Nous partageons nos difficultés du quotidien, de la vie de famille, mais aussi les effets secondaires, pas toujours évidents à évoquer avec l’entourage. »

Permettre aux patients d’échanger et de partager leur expérience, c’est aussi l’objectif de Mon réseau cancer colorectal, une nouvelle plateforme lancée par l’association Patients en réseau, à l’occasion de Mars bleu 2021. Colette Casimir, touchée par un premier cancer du côlon à 43 ans, en est la directrice. « Ce réseau social représente tout ce qui m’a manqué pendant toutes ces années », explique-t-elle. âgée maintenant de 59 ans, Colette est porteuse d’une mutation génétique rare et a vécu un parcours particulièrement difficile, ponctué de deux récidives : « Aujourd’hui, je n’ai plus de côlon, plus de duodénum, plus de vésicule biliaire, une partie de l’estomac m’a été enlevée, ainsi que la tête du pancréas et les ovaires. J’ai dû apprendre à vivre avec ce nouveau corps, raconte-t-elle. Même si – heureusement ! – tous les cas ne sont pas aussi compliqués que le mien, le cancer colorectal est une épreuve aux conséquences souvent très invalidantes. »

« Nous traitons de plus en plus de jeunes qui ont un cancer à 30 ou 40 ans » – Pr É. Rullier

Améliorer la qualité de vie

Parmi les plus redoutées par les patients, la stomie est l’intervention qui consiste à dériver le côlon vers un orifice pratiqué dans l’abdomen, auquel est fixée une poche destinée à recueillir les selles. Elle ne concerne que 5 % des cas de cancer du côlon, où elle est en général posée provisoirement, jusqu’à ce que la continuité soit restaurée. Elle est plus fréquente pour les cancers du rectum, et parfois définitive, lorsque le chirurgien est amené à retirer le sphincter. La maman de Sylvie a très mal vécu de vivre avec cette poche : « Elle avait peur qu’il y ait un accident, une fuite, elle n’osait plus sortir, aller chez des amis, ça l’a traumatisée.» A contrario, Sandra aurait presque préféré la garder : « Mon sphincter a beaucoup perdu de son efficacité avec la radiothérapie. Et je souffre de problèmes digestifs. Si j’essaie de manger normalement, je risque l’occlusion. Je ne prends qu’un repas le matin, et parfois, l’après-midi, je fais un petit goûter. Mais je ne peux plus aller au restaurant avec des amis. »

Les traitements du cancer du rectum, qui allient souvent chirurgie et radiothérapie, sont parmi ceux qui ont le plus d’impact sur le quotidien des patients. Et jusque sur leur vie sexuelle. Mais, là encore, la recherche avance. Dans le bon sens. En 2017, le Pr Éric Rullier, spécialiste de ce cancer, avait montré dans une étude publiée dans The Lancet que 40 % des petites tumeurs étaient neutralisées par la radio-chimiothérapie, rendant inutile l’ablation du rectum. Et voilà qu’en 2019, au congrès mondial de cancérologie organisé par l’Asco (American Society of Clinical Oncology), deux études (l’une française, l’autre européenne) ont mis en évidence que traiter aussi les grosses tumeurs par un couplage de chimio et de radiothérapie avant d’envisager la chirurgie pouvait non seulement améliorer le taux de survie des patients de 7 %, mais aussi préserver leur rectum dans un tiers des cas (voire dans 45 % à 60 % des cas, selon une troisième étude, américaine). Avec, à la clé, une nette amélioration de la qualité de vie. « Il semble qu’on se rapproche du modèle du cancer de l’anus, où l’on opère en dernier recours, analyse le Pr Rullier. Mais tout cela demande encore à être confirmé par d’autres études. Si c’était le cas, ce serait une vraie révolution. » Et un formidable espoir pour des milliers de patients.

INFO +

À lire, un témoignage épique et plein d’humour sur la traversée de la maladie : ON NE MEURT PAS COMME ÇA de Charlotte Fouilleron, éditions Pocket, 6,50 €

Un site à consulter pour s’informer et échanger : www.monreseau-cancercolorectal.com

 

Illustrations de Jérôme Meyer-Bisch

Retrouvez cet article dans Rose Magazine (Numéro 20, p. 88)

Dossier réalisé en partenariat avec la fondation ARC

1. Voir l’article « Oncogénétique, si le test est positif… », paru dans Rose Magazine, no 19, automne-hiver 2020.
2. Source : Santé publique France.
3. Vuik, Nieuwenburg, Bardou, et al., « Increasing incidence of colorectal cancer in young adults in Europe over the last 25 years », Gut, 2019.


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Karine Hendriks

Journaliste

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